Carte Postale d’Anvers

Bien avant l’éclatement de la crise sanitaire, nous avions souhaité aller au bout du monde. Si arriver sous les latitudes de l’Antarctique ne tient plus de l’exploit, n’avons-nous pas tout autant de mérite que Shackleton, Scott et les autres Gerlache qui n’avaient pas à jongler avec une montagne de paperasse pour passer d’Europe en Amérique du Sud ?

C’est le plein été ce 1er février à Santiago de Chili, je suis enbermudas dans le lobby de l’hôtel où nous sommes descendus, et nous retrouvons cette charmante dame qui était juste derrière nous dans l’avion vers Madrid. Elle avait pris une autre compagnie pour traverser l’Atlantique et, en nous abordant et en me regardant, elle demande à Sophie si le voyage avec son filss’est bien passé. A la terrasse du bar, notre nouvelle amie nous avouera que ce sont mes culottes courtes qui l’ont induite en erreur.

Le lendemain, 2 février, quelques deux mille kilomètres plus au sud, courte balade sous la pluie sur les rives du Détroit de Magellan. Nous sommes à Punta Arenas dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle a dû connaître, il y a très longtemps, des jours bien meilleurs. La percée de l’isthme à Panama a changé la donne et, depuis lors, cette ville en est réduite à donner le change aux quelques touristes qui remontent les canaux et longeront la Cordillère vers Valparaiso ou qui, comme nous, s’embarquent vers des contrées plus australes encore. Punta Arenas, la seule ville du Chili où le soleil sort de l’eau le matin pour se coucher au crépuscule derrière les derniers contreforts des Andes.

Jean-Baptiste Charcot, médecin, commandant de Marine et explorateur, occupe une position de choix au panthéon des marins du monde entier. C’est en son honneur que la Compagnie du Ponant a baptisé leur dernier-né « Commandant Charcot » et que nous rejoignons en début d’après-midi. C’est de notoriété, les virus affectionnent les navires de croisière et donc le protocole pour monter à bord est plus rigoureux que dans nos villes. Nous ne sommes que 150 pour 200 membres d’équipage, toutes professions confondues (navigation et mécanique, hôtellerie et restauration, expédition et exploration). Rien à dire sur l’accueil et, depuis lors, sur la qualité de toutes les prestations, en ce compris celles des guides naturalistes et scientifiques : il n’y a pas mieux.

Nous appareillons et, après une nuit dans les canaux chiliens, nous sortons à l’ouest du détroit, pas tout à fait au cap Horn,pour entamer la traversée de 2 jours (3 et 4 février) du passage du Drake que vous prononcerez à l’anglaise pour rimer avec Lake ou avec Shake.  Nous avons eu droit au « Lake » puisque cela n’a pas du tout bougé au cours de la traversée.  Aurons-nous la même chance au retour ?  C’est la question à 10 balles.

Arrivés dans la péninsule occidentale du 6ème continent où, une fois de plus, démonstration est faite que, à l’étranger, les Belges boxent souvent au-dessus de leur poids. C’est avec respect que nos amis français parlent d’Adrien de Gerlache, dans le sillage duquel nous naviguons, notamment parce qu’il a eu le bon goût de nommer le plus haut sommet par ici « montagne de France », située sur l’île qu’il a baptisée Anvers (prononcez à la française comme dans « envers et contre tout »), juste à côté de l’Ile du Brabant. Nous pouvons pavoiser : ici les Belges sont partout. Ce qui décoiffe, ce sont les montagnes culminant à plus de 2.500 mètres qui viennent s’effondrer dans la banquise à quelques encâblures d’icebergs aussi hauts que notre navire ainsi que les passages étroits au-dessus desquels trônent des menhirs naturels et gigantesques.

Première sortie hier matin, 5 février, où nous accostons en Zodiac pour nous familiariser avec les quelques manchots – on ne parle pas de pingouins dans cet hémisphère ! – qui n’ont pas encore entamé leur périple maritime de 4 ans au terme desquels ils reviendront procréer à leur exact point de départ.  La déclivité est convenable et la promenade sera facile … à condition de ne pas s’enfoncer dans la neige dont on ne s’extrait que comme le plus disgracieux des phoques.

Seconde sortie ce matin du 6 février et balade en zodiac, plus au sud encore : Nous sommes 9 avec notre jeune pilote, Léo Decaux, glaciologue et docteur d’université, qui nous explique en termes choisis tout ce qu’il faut savoir sur le réchauffement climatique, le potentiel d’élévation du niveau de la mer, l’expansion thermique des glaciers et le rôle moteur du sel dans les courants marins … Arte lui a consacré une émission où on le voit s’aventurer à l’intérieur des icebergs de Norvège. Nous en avons visionné une partie cet après-midi et cela donne la chair de poule …

Nous poursuivons donc notre route toujours plus au sud et le navire s’enfonce lentement mais sûrement dans la banquise …

A propos newdavid

La vie est un long fleuve tranquille
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3 commentaires pour Carte Postale d’Anvers

  1. Dominique Blieck dit :

    Éblouissant mec ! Tu y es encore ?

    Dominique Blieck

  2. Guy Savoir dit :

    Merci David

    Comme toujours , on a l’impression d’y être

    Beau voyage

    Guy Savoir

    Licencié en Sciences Commerciales et Financières
    Expert-Comptable / Conseil Fiscal ITAA
    Coserti NV / Advisae SRL-BV
    Hermesstraat, 4A – 1930 Zaventem
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